Lettre ouverte de Gabriel Wahl

Gabriel Wahl, qui est présent dans notre conseil scientifique, nous a autorisés à diffuser sa lettre ouverte, adressée aux députés, auteurs du rapport de la Mission flash sur la précocité intellectuelle. Nous sommes totalement en accord avec ses arguments. Chacun pourra réfléchir sur le fait que Gabriel Wahl est un clinicien, acteur de terrain, mais il tient compte des résultats scientifiques. VOICI:

 » Lettre ouverte  » 
 
Dr Gabriel Wahl     à       Mmes les députées Marie-Pierre Rixain et Frédérique Meunier 
 
Mesdames,
j’ai écouté attentivement votre rapport sur la « Précocité et troubles associés : quelle prise en charge à l’école ? ». 
Vous m’avez fait l’honneur de me citer, mais je crois que ce que je défends sur ce sujet soit peu en harmonie avec la tonalité d’ensemble de votre rapport. 
Les spécialistes se partagent en deux « camps », les premiers ont tendance à « pathologiser » la précocité intellectuelle et annoncer pour ces enfants,  petits et grands malheurs, alors que les seconds et j’en suis, ne se fiant qu’aux études statistiques et scientifiques, observent que  la précocité intellectuelle offre infiniment  plus de chances qu’elle ne provoque de risques. 
Un exemple : le taux d’échec au brevet pour l’ensemble des collégiens est de l’ordre de 13%, quand il ne dépasse pas 1% pour les enfants précoces. 
Pour ma part, je déplore que ce courant alarmiste et simpliste conquiert  les  médias et les politiques, ce qui n’est pas sans conséquence dommageable sur nombre de points. Je n’en citerais que deux :
1 / Ce discours négatif  sur la précocité intellectuelle finit par inquiéter les parents.  Je peux témoigner qu’il n’est plus rare que des parents me consultent au seul motif  que leur enfant est surdoué, craignant  le pire pour leur enfant, après avoir lu ou entendu dans les médias ou sur le net que les surdoués sont voués à la fragilité affective et destinés à l’échec scolaire. 
2 / Mais plus grave encore, le discours pathologique sur l’échec scolaire devient un obstacle à de bons diagnostics. Il est maintenant fréquent d’entendre que si un enfant est en échec scolaire,  inattentif,  anxieux,  triste ou DYS,  c’est parce qu’il est surdoué. Et ainsi, passent à la trappe, d’authentiques troubles tels que, par exemple, un TDAH ou même d’authentiques syndromes psychiatriques . Ce sont autant d’enfants abandonnés à leur souffrance et laissés sans soins au nom d’un discours « moderniste » sur la précocité intellectuelle.  
La précocité intellectuelle mérite un peu de discernement. 
En tant que telle, la précocité  peut certes bénéficier d’une offre pédagogique personnalisée, mais elle n’impose ni même ne justifie une prise en charge médicale ou psychologique. 
Je me tiens à votre disposition pour ce sujet, mais plus encore, pour vous parler des inégalités scolaires liées aux inégalités d’accès aux soins. 
Bien à vous
Gabriel Wahl
Psychiatre d’enfants 
Auteur notamment de Comprendre et prévenir les échecs scolaires (Odile Jacob) et de Les enfants intellectuellement précoces (Que sais-je ?, PUF). 
 
 
 
 
 

Les surdoués de l’enfance à l’âge adulte – France Inter

https://www.franceinter.fr › Émissions › Les surdoués de l’enfance à l’âge adulte
 
 
 

Mission flash AN

La mission flash a rendu son rapport et nous avons écouté attentivement la vidéo et lu le document.

Nous avons plusieurs observations à exposer, en tant qu’association concernant le haut potentiel, créée pour diffuser les informations scientifiques sur le sujet.

La médicalisation du sujet par le terme « prise  en charge » nous interpelle. De même que le « suivi médical ». Il est inquiétant que l’on puisse penser que l’intelligence doit être envisagée en terme médical, voire de handicap.

Extrait :

« Il nous paraît donc indispensable qu’un enfant identifié comme étant intellectuellement précoce soit automatiquement signalé à l’équipe pédagogique grâce, par exemple, à la mise en place d’un dossier de suivi, sur le modèle des dossiers médicaux, qui l’accompagnerait tout au long de sa scolarité et dans lequel pourraient figurer l’ensemble des informations utiles à sa prise en charge (proposition n° 5). « 

 

C’est la teneur négative du rapport et de la vidéo qui prédomine globalement, même s’il est dit (en toute fin à seulement 1 h 05) ,  qu’une majorité d’enfants précoces n’ont pas de difficultés scolaires.

Nous avons une inquiétude au sujet de certaines des préconisations qui pourraient avoir pour conséquence une stigmatisation des enfants surdoués dans les écoles ou collèges, comme le sas. Le « sas de décompression » les désignera du doigt d’emblée. Les « intellos » sont déjà harcelés dans les classes, actuellement, c’est un problème récurrent.

« la mise à disposition d’un local réservé aux élèves précoces animé par un adulte référent servant de lieu d’écoute, d’échange, de travail et de repos  »

peut prêter à rire.

En outre les ULIS, ne sont pas exclues,

« programme spécialisé, mise en place éventuelle de nouveaux outils tels que les unités localisées pour l’inclusion scolaire (ULIS) pour les EIP. Aucune solution ne doit être écartée. »

ce qui choque les enfants précoces eux-mêmes et les parents d’enfants précoces. Ces enfants sont sensibles et vont vite comprendre l’acronyme.

« Les élèves scolarisés au titre des ULIS présentent des troubles des fonctions cognitives ou mentales, des troubles spécifiques du langage et des apprentissages, des troubles envahissants du développement (dont l’autisme),  des troubles des fonctions motrices, des troubles de la fonction auditive, des troubles de la fonction visuelle ou des troubles multiples associés (pluri-handicap ou maladies invalidantes). »

http://eduscol.education.fr/cid53163/les-unites-localisees-pour-l-inclusion-scolaire-ulis.html?fbclid=IwAR0JAeM-gz93mMWQs_1FHwk9V29Jo6j2V85W-4l4WSu5qDljVff39Cij8qg

 

Franck Ramus a été auditionné, mais la parole scientifique n’a eu que peu d’impact pour la rédaction de ce rapport. La préconisation finale voulant faire des mesures communes avec le handicap est symbolique d’un mouvement de pathologisation du haut potentiel qui est prégnant depuis quelques années. Ce rapport en est le résultat. Il est totalement dommageable pour le présent et l’avenir de ces enfants et leur estime de soi de les laisser penser qu’ils doivent être mis à part.

Nous savons déjà que des référents EIP sont des enseignants ASH (enseignants spécialisés pour le handicap) très souvent. Ce fait est  suffisamment préoccupant.

Ce qui n’apparaît pas dans le rapport, c’est la non représentativité des personnes qui consultent pour généraliser. (quelques %). Cette information a été soulevée par l’article la pseudoscience des surdoués de F Ramus et N Gauvrit. (2017)

Par ailleurs, si l’on fait croire que le haut potentiel est une source de malheur, les diagnostics des vrais troubles ne seront pas posés. Malheureusement pour des enfants avec TSA ou TDAH par exemple.

La menace d’une prophétie autoréalisatrice plane également.

Pour lire le PDF complet, cliquer sur :

Communication Mission Flash Précocité

La vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7162624_5c4726dacddb2.commission-des-affaires-culturelles–conclusions-des-missions–flash—-precocite-et-troubles-a-22-janvier-2019

Bonne Année 2019

Toute l’équipe des Hauts Talents  vous souhaite une très bonne année 2019 à tous !

Nos vœux pour 2019 :

Que tous les talents soient intégrés à leur juste place.

Que tous les talents soient reconnus, sans pathologisation excessive.

Que les informations scientifiques concernant le haut potentiel soient diffusées.